La société civile Tangéroise

Ces femmes engagées…

Mounira Bouzid El Alami
Présidente de l’association DARNA

La société civile de Tanger est vivante, forte, présente sur tous les fronts. Elle défend les dauphins autant que les vieilles pierres, les enfants autant que les femmes, la forêt autant que le patrimoine construit ancien mais aussi récent. Nous avons choisi de vous présenter deux de ces femmes engagées, véritables entrepreneuses dont le travail au quotidien apporte bienfait pour les démunis et nouvel éclat pour les friches urbaines.

C’est grâce à elles que Douar « chouk », quartier informel rapidement érigé, est devenu douar « Al ouard », coquet et fleuri. Formées d’intellectuels souvent inflexibles, les associations s’érigent en contre pouvoir et donnent parfois du fil à retorde aux collectivités locales. C’est qu’elles défendent l’espace public et font un réel travail de sensibilisation pour la cause commune qui les inspire. A Tanger, les associations ne sont pourtant pas réticentes à travailler avec les institutions. D’ailleurs la wilaya s’appuie sur elles pour conforter une idée ou sensibiliser à la cause publique. Elles ont réussi à dégager des décombres des ruines de masures abandonnées pour en faire des sites d’accueil pimpants pour les enfants des rues ou les femmes en détresse. Nous avons rencontré des figures de proue de ce genre d’action, qui permet d’utiliser des espaces à l’abandon tout en faisant œuvre utile. Ces réhabilitations sont exemplaires car elles permettent l’usage des friches urbaines pour la bonne cause. Une démarche qui devrait être modélisée afin que toutes les constructions urbaines puissent retrouver un usage social qu’il soit artistique ou caritatif. Cela permet d’éviter le squat, redonne fière allure à des anciennes constructions, ravive la mémoire collective en créant des liens entre les générations. L’espace public perd son côté redoutable et effrayant et les Tangerois retrouvent dans leurs quartiers réinvestis, leurs habitudes de deviser ensemble dehors, comme ils aiment à le faire.

Darna : Centre d’accueil des enfants de la rue

Etat d’origine

Mounira El Alami fait partie de ces militants de Tanger les plus en vue. Elle a troqué sa casquette de psychanalyste pour agir sur le terrain. Elle a démarré son action par la création de la fameuse « Darna » un nom tendre pour accueillir les enfants de la rue. Rapidement, elle a voulu venir en aide aux jeunes femmes en difficulté, pour éviter justement qu’elles soient contraintes en devenant mères à abandonner leurs enfants. Ces femmes qui arrivent des djebels environnants désarmées, naïves, sans soutien. Elles les prends sous son aile et les aident à étudier où à apprendre un métier. Elle est parvenue à installer et équiper une centaine de chambres pour les recevoir. Cette passionaria de Tanger ne recule devant rien. Au volant de sa minuscule voiture noire, elle fonce d’un espace à un autre pour vérifier, relancer, agir et résoudre les problèmes des cinq institutions sociales qu’elle a initiées. Mounira El Alami a adopté Tanger alors qu’elle a vécu à la campagne et qu’elle est d’origine Slaoui. Elle tient de son père son militantisme. M. Bouzid avait en effet créé une école de qualité qui a bénéficié à ses propres enfants mais aussi aux enfants des ruraux et des colons. Il a communiqué à sa fille l’envie d’apprendre mais aussi celle de donner aux autres, sans discernement d’origine ni de milieu social. Ses études parisiennes n’ont fait que renforcer son amour de la chose publique et son sens du bien commun. Elle retourne au Maroc et convainc son époux d’installer son industrie à Tanger. Depuis lors, elle quitte rarement la région et s’applique à garder l’œil ouvert sur les disfonctionnements de sa ville en dérive.