AM N° 55 Casablanca, un siècle plus tard
Presque cent ans plus tard, Casablanca abrite des projets qui n’ont rien à envier aux capitales des pays riches. Elle devient ainsi la métropole rêvée par Prost dès ses premiers plans en 1914. Elle a repoussé ses limites pour s’élargir et s’est coupée de l’océan. Aujourd’hui, elle renoue avec son littoral, transforme ses friches industrielles, aménage les espaces désaffectés. Ce faisant, le paysage urbain change radicalement. Que ce soit sur la côte, dans le nouveau quartier de l’ancien aéroport d’Anfa, au cœur du centre ville historique, dans l’ancienne zone industrielle de Sidi Bernoussi, des bâtiments prestigieux voient le jour.
Casablanca est comme New-York, sans complexes, dotée d’une bonne énergie, entrepreneuse. On peut y réaliser les rêves les plus fous, les affaires les plus audacieuses, les immeubles les plus hauts, les mosquées les plus grandes…Ce qu’elle a de particulier, c’est cette parfaite adéquation entre sa transformation urbaine et la mentalité de sa population. Le dynamisme de la métropole est légendaire et son architecture est à l’image de ses habitants. Toujours en mouvement, toujours en devenir, adoptant les expériences d’ailleurs, dans une modernité profondément ancrée dans les esprits. Les Casablancais aiment leur ville sans y être nés, car c’est la ville de tous les possibles.
Ouverte sur l’international, inclusive, la ville butine dans les genres, les styles, les matériaux, les couleurs…Son patrimoine bâti est défendu par des militants inconditionnels qui regrettent l’abandon des anciens centres. Les quartiers évoluent rapidement et deviennent accessibles grâce au tramway. Même la fameuse corniche a été radicalement transformée alors que son foncier est extrêmement problématique.Après le cinéma Mégarama, le centre commercial Morocco Mall et Anfa Place, de nouveaux projets comme la Marina et Sindibad Beach Resort, offriront des équipements de loisirs, de commerces, de bureaux qui amélioreront de manière spéctaculaire la fameuse Corniche. Ces nouvelles animations adapteront les richesses naturelles du littoral à leurs services. Car la dynamique économique ne s’arrêtera pas et continuera à attirer les investisseurs des quatre coins du monde.
Dans ce numéro, vous allez découvrir en exclusivité, la tour CFC, Casablanca Finance City, dessinée par des Prix Pritzker, ténors de l’architecture mondiale, invités à concourir. Vous admirerez les projets de la Marina et de Sindibad réalisés par des confrères nationaux. Vous apprécierez les détail des projets signés par des sommités de l’architecture comme Anfa Place ou le théâtre Cas’art…
La Marina profite des 24 hectares gagnés sur la mer, face à la médina. Les tours qui y seront érigées atteindront 16 étages. Elles modifieront radicalement la sky line, mais déjà les Casablancais les ont adoptées. Avec le tramway, le mobilier urbain : bancs, arrêts de bus, barrières, conçus par des architectes designers, prend de l’allure. Si les institutions publiques tentent de faire respecter les règles d’urbanisme, la commission d’esthétique, elle, est en souffrance. Casablanca demeure la ville rebelle qui ne souffre d’aucune homogénéité et adopte tous les excès. Les architectes ne s’embarrassent pas d’intégration au site. Il y a autant de projets que d’expressions stylistiques. Peut-être que la petite maison blanche visible du large qui a donné son nom à Casablanca reste dans la mémoire collective. C’est pourquoi les Casablancais ont adopté cet éclectisme dans une gaie variété. Mais n’est-ce pas cela justement – l’éclectisme raisonné – la base du mouvement moderne ?
Selma Zerhouni