AM N°44 L’architecture durable
L’architecture durable ne peut se limiter à la consommation de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux dits « écologiques ». Elle ne peut se contenter de la pose de quelques panneaux solaires ou d’une isolation sophistiquée pour justifier de son appellation. Quand bien même l’architecture abriterait un dispositif pour économiser l’eau ou recycler les déchets, il manquerait encore l’économie d’énergie ou l’isolation… Bref, il y aurait toujours du chemin à faire en vue du développement durable !
Dans ce domaine, la considération environnementale devrait être le propos naturel des architectes puisqu’ils remplacent les anciens bâtisseurs. Et puisqu’ils ont eu la chance de passer par l’école, ne pourraient-ils dès lors, étendre leur domaine d’activité aux domaines social et économique ?
Ils pourraient tirer quelques leçons des techniques anciennes, les revisiteraient à la lumière du savoir d’aujourd’hui pour s’en inspirer et revaloriser les intégrations harmonieuses de l’architecture vernaculaire et bioclimatique tout en la modélisant dans des concepts théoriques. Il faut dire que la disposition des espaces de vie autour du patio, filtre de lumière et antre d’intimité, est une belle solution. Quant aux Moucharabiehs, ou les Chemassiates, qui canalisaient le passage du vent et forçaient la ventilation naturelle, avant de passer à travers l’eau des bassins, des Salsabils ou des fontaines, cela demeure une trouvaille. Nos ancêtres ont inventé l’air conditionné avec l’élégance et l’efficacité qu’il s’agit de reconduire. L’eau de pluie était stockée dans les madéfiâtes à l’intérieur, dans les ghettarates à l’extérieur dans un circuit à la fois raisonné, équitable, économique…L’épaisse maçonnerie en terre ou pierre offre encore le témoignage incontestable de la réussite bioclimatique que l’on peut apprécier dans les Ksour et Kasbah. Ce rapprochement des techniques anciennes n’est en aucun cas nostalgique. Il redonne un sens profond à l’histoire de l’architecture et devient de nos jours l’avant garde, puisqu’il réconcilie avec des savoirs faire et permet d’éviter les pauvres copies historisantes de la richesse décorative sans la fonction initiale. Dans les domaines économique et social, l’architecture durable est présente à chaque décision de l’architecte et du maître d’ouvrage. Elle est une attitude d’ordre éthique, philosophique. A sa lumière, la conception du projet devient responsable et créative. Chacune des prescriptions devient garante des convictions du concepteur, de ses idées, de sa culture sans aucune approximation.
L’architecte responsable affinerait donc sa réflexion pour traquer l’intégration, avec le quartier, la ville, le pays. Il étendrait nécessairement son champ d’action au delà de son projet, gracieusement. Il saurait qu’en offrant ses conseils dans le cadre de cette mentalité durable, « soutenable », il dépasserait la pratique professionnelle étriquée, confinée à son objet et deviendrait militant pour une cause humaniste. La prise de conscience dans ce domaine est avant tout morale. S’attacher uniquement à la partie environnementale est réducteur du métier. Cela revient à sous estimer la mission du maître d’oeuvre dans la cité qui peut largement contribuer à fixer le modèle national et à raisonner les valeurs endogènes à partir de chaque bâtiment qu’il érige. L’Homme reprendrait alors sa place centrale et influerait sur les techniques et l’esthétique pour répondre aux règles de l’art. Décidément, l’architecture durable de demain sera avant tout une architecture humaine.
Selma Zerhouni
Sommaire
BIOGRAPHIE
ÉDITORIAL
L’architecture durable
COUP DE COEUR
Terre & Humanisme Maroc Sarah Zaïd
CONCOURS
Les Mipim Awards 2009
DÉBAT
Green Rating, un outil pour l’existant Florence Michel-Guilluy
La culture du développement durable Abderrafi Lahbabi
Expertise Marocaine Propos recueillis par Selma Zerhouni
L’AMCOD ou Comment mettre en oeuvre les synergies Abdeljalil El Hassani Sbai
Des bâtiments satisfaisants du point de vue environnemental et des territoires durables Gilles Olive
La démarche Belge pour l’éco-construction et la construction durable Christian Legrand
Holcim et le développement durable Propos recueillis par Bouchra El Farès
Développement durable – Pour une nouvelle génération de villes vertes Abdelhai Bousfiha
Le Tramway, un vecteur ultramoderne de lutte contre la pollution Ito Dias
Appel au bon sens Jaafar Sijelmassi
ARCHITECTURE
Sahel Lekhiaita, ville nouvelle durable d’Al Omrane Florence Michel-Guilluy
Projet La colline à Tamesloht – H2O architectes, Associati
Bab Zaer, une ville à la campagne Florence Michel-Guilluy
Mundiapolis, campus universitaire bioclimatique Sarah Zaïd
Touareg City Propos recueillis par Hanane Bouchtallah
Tahanaout, Douar d’hôtes vernaculaire Salima Naji
Lorsque « Rénover » rime avec « Sauver » Abdelmalik Hounain
Zurich Assurances, la construction durable suisse importée au Maroc Asmae Issam
Thalvin, un môtel d’agrotourisme à Benslimane Hanane Bouchtallah
La maison éco-durable est une maison autonome Bouchra El Fares
L’exemplaire Tigmi Sophie Geissmann
La maison écologique industrielle Bouchra El Fares
L’architecture contemporaine de terre Selma Zerhouni et Hubert Guillaud
MATERIAUX
Matériaux Verts Nadia Hseine
ART
Les preuves s’abattent sur la modernité ! Asmae Issam
C’ Tout Recyclé Khadija Kabbaj
ETUDIANTS
Contre-projet d’Anfa Place de Sir Norman Foster à Casablanca Boubker Sefraoui
ENVIRONNEMENT
La mutation d’un bidonville à Larache – Ça, c’est du durable ! Selma Zerhouni
Le projet oued Fès, primé deux fois aux Holcim Awards ! Boubker Sefraoui
BREVES