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AM N°21 Villes nouvelles

« Quoi de neuf ? »

« La ville nouvelle ! »

Congestion, surdensité, cohue, exode rural incontrôlé, besoin pressant, logement de masse, le lexique consacré à la ville ces dix dernières années est pour le moins défaitiste. L’urbanisme se qualifie par ses erreurs, se définit par ses expériences, s’applique par des directives administratives et se vit comme une fatalité voulue par autrui, cet autre qu’on appelle le v pouvoir public n. Depuis longtemps on cloue au pilori la confection urbaine parcellaire, le lotissement spéculatif, le zonage approximatif, des cités morcelées au gré des liaisons intéressées entre hommes politiques et budgets.

Cette fois, la proposition politique s’est annoncée en termes de projets clairs : Des villes nouvelles. Nous vous proposons dans ce numéro de suivre un autre trajet et de réfléchir la ville dans des contours innovants.

La terminologie est connue puisqu’elle évoque les réalisations françaises des années 70, à Marne-la-Vallée, à Saint-Quentin en Yvelines… Nous sommes donc en terrain familier. Mais la référence n’est pas réjouissante à partir du moment où elle a donné lieu à des
territoires d’exclusion innommables pour une population considérée comme indésirable et parquée dans les franges urbaines des grandes villes. Cette notion de villes dortoirs a un effet repoussoir et dans le milieu professionnel elle est synonyme surtout de violence et de mal vivre.

Mais sortons de l’attitude réactive et oublions la ville nouvelle française. Les erreurs commises en France sont en cours de réparation et nous ne pouvons — contexte historique oblige — reconduire les mêmes chez nous. Sous l’angle étymologique, on rentre cependant dans la magie des découvertes dès l’intitulé ; il se met à résonner comme la trouvaille du siècle pour nos mémoires emplies de souvenirs éculés et ratés.

Examinons la volonté exprimée d’empêcher le développement concentré sur le germe original de chaque ville. C’est la région qui devient concernée, la démultiplication des centres se transforme en réseautage de villes entre elles Porte ouverte sur un nouveau monde, l’avenir inconnu que nous propose la notion devient alors une aubaine. La ville dans ce nouvel esprit prend l’allure grisante d’un territoire à découvrir où la transition ville-campagne est enfin maîtrisée. De plus, pour la première fois. le retard pris sur les nouvelles technologies et les réalisations d’infrastructures s’avère ici bénéfique. C’est grâce à ce retard sur les pays avancés que nous pouvons disposer d’une quantité colossale d’informations, de solutions techniques et de critiques qui pourraient à elles seules servir de guide-des-choses-à—ne—pas-faire en matière de ville nouvelle. Parmi les critiques, les plus sévères et les plus récurrentes portent sur le temps consacré à la réalisation et la responsabilité personnelle de la fondation des futures villes. 15 villes nouvelles ont été annoncées, mais on ne sait toujours pas qui composera le fameux binôme, comprenant le commanditaire éclairé et le maître d’œuvre inspiré.

Il est vrai que depuis I’Antiquité, les villes se sont érigées avec la complicité nominative et courageuse de deux acteurs essentiels : le prince et l’architecte. Sans cette miraculeuse alchimie, cette responsabilité partagée, le germe ne prend pas. Évoquons Sinan et Souleimane pour lstambul, Haussmann et Louis-Ferdinand pour Paris, Pouillon et Boumédiéne pour Alger. Le Corbusier et Nehru pour Chandigarh… Cette dernière, fondée en 1947. a permis à 1 million d’habitants de vivre en bonne harmonie dans un espace structuré et un urbanisme attrayant pendant plus de 50 ans. Les détracteurs des villes nouvelles qui considèrent que le critère temporel est un facteur essentiel dans la qualité de l’espace urbain sont là à court d’arguments. La nouveauté n’étant plus indicée de légèreté et de désinvolture, tous les rêves sont permis ! Les technologies récentes et les possibilités immenses qu’elles offrent dans divers domaines de la construction, de la préservation de l’environnement, des matériaux, de la production d’énergie, en seront le conducteur, finis les lotissements gigantesques livrés aux promoteurs et à nous les desseins de villes contrôlées pour le bien-être des citoyens ! Espérons que la ville nouvelle marocaine, voulue dans sa nouveauté, sera fondée sur l’approche libératrice des contraintes et édifiée sur la nouvelle origine qui sera la nôtre, celle du
village planétaire.

Selma Zerhouni

Sommaire

ÉDITORIAL

« Quoi de neuf ?  »
« La ville nouvelle !  »

ACTUALITÉS

Le CRI de Rabat

CONCOURS

Des italiens remportent le concours de « Green Résidences » – Marrakech dossier préparé par Khaddouj Zerhouani

DÉBAT

Du territoire national gagnant – Interview avec Mohamed Elyazghi propos recueillis par Selma Zerhouni

Histoire d’une forme urbanistique : les villes nouvelles par Mohamed Chaoua

Villes nouvelles au Maroc : quelles perspectives ? par Khadija Karibi

Vers la production de 15 villes nouvelles par Abdelhai Bousfiha

Qui décide de la création des villes nouvelles ? par Kamal Saâdi

Existe-il une méthodologie de création de ville nouvelle qui s’imposerait dans l’histoire ? par Sandrine Pastre

Aousserd, nouvelle cité ouest saharienne par Mustapha Naimi

De Chandigarh à Tamansourt par Amine Cheddadi

Facteurs spécifiques de pauvreté et d’exclusion dans les villes marocaines par Abdeljael Grefft Alami

ARCHITECTURE

Une ville, une identité par la Direction Générale de l’Urbanisme et de l’Architecture

Hay Ryad, du programme de logements à la ville nouvelle par Nadia Jebrou

Tamansourt, une ville nouvelle aux portes de Marrakech par Karima Slaoui

Noor Zaër, un atout pour Rabat, Témara et la région par ERAC – Tensift

ART

Fouad Bellamine, producteur de peinture… un engagement Extrait du catalogue de Fouad Bellamine réalisé par Philippe Cazal. Les textes sont de Nadine Descendre

L’ingénierie culturelle au Maroc propos recueillis par Khaddouj Zerhouani

ENVIRONNEMENT ET PATRIMOINE

La dépollution de la région de Rabat grâce à l’aménagement du Bouregreg par Ito Dias

ESPACE ETUDIANT

Voyage d’étude de l’ENA par Abdeslam Akkar

BRÈVES

POÉSIE

lsell et Tislit par Mostafa Nissabouri