AM N°13 Les espaces commerciaux

L’architecture commerciale peut-elle résister à la globalisation ?

S’il y avait un espace en voie de disparition au Maroc, ce serait l’espace commercial traditionnel. La loi du marchandising international a annoncé sa disgrâce à coup de publicité et de communication. Elle a donné un signal fort par l’entremise de bâtiments imposants et de leur présence notoire. Les grandes surfaces, les hypermarchés, les méga-marchés, temples de consommation, font partie désormais de notre environnement.

Ils sont même devenus inévitables dans toutes les périphéries urbaines. Déjà, ils triomphent à l’entrée de la capitale, sur la route de Zaër, en un chapelet d’enseignes prestigieuses. Ils proposent de consommer heureux, en perdant peu de temps, en faisant du sport, en surveillant le jeu des enfants, en achetant des marques, importantes, connues, attendues. On succomberait volontiers, on se laisserait prendre au charme de ce triomphe annoncé sans hésiter, s’il n’y avait cette vivacité de la mémoire collective, cet atavisme culturel.

C’est cela qui nous fait revisiter notre patrimoine populaire et vernaculaire. Il nous fait prendre conscience de notre attachement à ces petites échoppes qu’on cherche au détour d’un derb ou d’une driba de médina. Il nous fait réaliser que le sourire affable du marchand, qu’on croyait immortel malgré ses quelques rides supplémentaires, nous manquerait s’il venait à disparaître.

Nos réactions sont contradictoires et résistent simplement à l’évolution incontournable vers l’uniformisation que propose le grand médiateur mondial.

Mais faut-il y renoncer et rompre brutalement les liens avec les fondouks d’antan, les souks poussiéreux et bruyants, les kissarias bourrées d’odeurs et de saveurs qui guidaient nos pas d’enfants ? Depuis l’aube des temps, le Maroc a connu un commerce florissant. À l’époque des légendaires caravanes transsahariennes, des fameux souks ruraux, des fondouks aux abords des cités, puis plus tard, des grands magasins et les galeries commerçantes.

Les Marocains ont fréquenté tous ces espaces commerciaux en transformant lentement leurs habitudes. Ils n’ont jamais connu des changements aussi spectaculaires que ceux auxquels ils assistent aujourd’hui. Leurs repères n’y sont plus. Les géants de la consommation, ces grandes enseignes, ces forces puissantes et occultes balayent sur leur passage toute une culture endogène ancrée dans l’échange et la convivialité sans s’inquiéter.

Pourtant, il suffirait d’observer des espaces commerciaux spontanés, comme celui des Joutiya dont celle de Derb Ghallef à Casablanca, connue mondialement, pour se rendre compte que son impact est immense et son organisation sophistiquée.

Grouillant de monde et de business, ces lieux sont attractifs et méritent qu’on s’y arrête. Ces endroits pittoresques pour les courses pourraient devenir un lieu d’exaltation de la découverte et de plaisir de la rencontre. Et si la mutation est inéluctable pour notre pays, au lieu de répondre aveuglément aux lois de la mondialisation, pourquoi ne pas participer aux changements de cette modernité, en conduisant l’évolution vers un futur espace commercial réinventé et novateur inspiré du dispositif endogène.

Selma Zerhouni

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ÉDITORIAL

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ACTUALITÉS

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