AM N°12 Architecture du Sahara

Le Maroc est-il Saharien ?

Si l’architecture avait un rôle politique à jouer, il serait d’un ordre démonstratif. Au Sahara, les repères construits sont éloquents et les traces de notre mémoire collective établissent notre appartenance au lieu sans équivoques. Qu’ils soient archéologiques ou historiques, les signes de notre passé permettent de jalonner les passages de nos ancêtres, car ils ont laissé des repères de toutes sortes, des dessins
gravés dans de la roche, des ruines reconnaissables, des topographies mystérieuses en dessous desquelles on devine des villes disparues…

Le Sahara foisonne.

Nous avons eu la chance d’être guidé dans ce monde fascinant par un fin connaisseur du Sud du Maroc : Mustapha Naïmi. Ce chercheur qui en est originaire nous a fait découvrir sa passion, à travers des témoignages précieux, immuables, irréfutables. Grâce à lui, nous avons réalisé que le Sahara n’est pas vide. Que ces étendues ne sont pas une terra nullius. Si le paysage qu’il propose a attiré de
nombreux poètes, c’est que son charme est irrésistible, fait de force et de puissance.
Comme la mer, l’attrait qu’il exerce sur l’homme est saisissant alors qu’il tient davantage de la lutte. En s’y immergeant, l’homme ne privilégie plus que des valeurs comme la solidarité, la protection des faibles, le respect des femmes. Le rapport humain est exceptionnel. Il valorise l’homme par son authenticité et fait plonger ses racines culturelles jusqu’aux entrailles de la terre pour y trouver des reliques de guerriers irréductibles ou de fières tribus. Sur place, on comprend combien le Sahara recèle notre mémoire vive. Car comment interpréter autrement cette formidable histoire qui nous a été racontée par le descendant direct du Cheikh Maâ El Aïnaïn, qui explique que son ancêtre a construit sa belle Zaouia en tenant compte de l’équidistance entre la mer, la route du commerce des caravaniers, la montagne et que si son architecture fut érigée en modèle par les espagnols, c’est que le sultan Abdelaziz n’avait pas hésité alors à faire appel aux meilleurs maâlems de Tanger, Fés, Marrakech pour ériger cette œuvre d’art.

Voilà encore un exemple éloquent de la marocanité de nos provinces du sud. Au-delà des politiques déclarées, des stratégies des pouvoirs publics, des accords internationaux, du jugement de la Haye, des résolutions de l’0NU et du résultat de l’hypothétique référendum, on peut affirmer que l’architecture a mille fois voté. Depuis des millénaires, le Sahara se nourrit du Maroc et le Maroc se trouve bien au Sahara.

Nous avons tenté dans ce numéro de nous rapprocher de certaines traces que nous présentons à nos lecteurs. Beaucoup reste à découvrir, mais on ne peut continuer à ignorer les gravures rupestres de Akka, la Zaouia de Maâ El A’ina’in à Smara, la mosquée Almoravides de lfrane, le donjon de Tamanart.

Les débats vous offriront les explications stratégiques du Directeur de l’Agence du Sud, Ahmed Hajji ainsi que le point de vue de nombreux universitaires, chercheurs et responsables qui nous ont aidé à faire ce numéro et qui nous ont accueilli sur place. Nous les remercions ici de nous avoir permit de prolonger cet attachement charnel qu’on peut avoir pour ce milieu magnifique. L’endroit où reposent nos ancêtres. Maintenant que l’architecture a parlé, comment vivre aujourd’hui au Sahara en retrouvant ses qualités hospitalières ? Une fois posée, la véritable question se tourne
elle-même dans le bon sens : à quel point le Maroc est-il saharien ?

Selma Zerhouni

Sommaire

ÉDITORIAL

Le Maroc est-il Saharien ?

ACTUALITÉS

L’expérience inédite de Bank Al-Maghrib par Bank Al-Maghrib

La médina, une cite nouvelle ? par Selma Zerhouni

DÉBAT

Le marketing territorial selon Ahmed Hajji propos recueillis par Selma Zerhouni

Laâyoune, une ville en plein développement propos recueillis par Khaddouj Zerhouani

Le programme des villages de pécheurs propos recueillis par Nadia Jebrou

La passion du Sud propos recueillis par Selma Zerhouni